Étiquette : microenvironnement tumoral

Le rôle des mitochondries dans la reprogrammation des fibroblastes associés au cancer

Les scientifiques ont découvert que les cellules cancéreuses recrutent des fibroblastes pour soutenir la croissance tumorale en leur transférant des mitochondries. Cette découverte ouvre de nouvelles pistes pour le traitement du cancer. En effet, les cellules cancéreuses ne fonctionnent pas seules ; leur succès repose souvent sur la coopération avec les cellules environnantes. Ces dernières peuvent parfois donner des mitochondries aux cellules cancéreuses, ce qui booste leur métabolisme et favorise la croissance tumorale. Dans le cas du cancer de la peau, des transferts mitochondriaux entre fibroblastes associés au cancer (CAF) et cellules cancéreuses ont été observés. Pour la première fois, une équipe de chercheurs de l’ETH Zurich a montré que le phénomène inverse se produit également : les cellules cancéreuses transfèrent des mitochondries à des CAF. Les CAF jouent un rôle clé dans le microenvironnement tumoral en construisant et maintenant le système de soutien de la tumeur. Dans leur étude publiée dans Nature Cancer, les chercheurs ont co-cultivé des cellules cancéreuses cutanées A431 avec des fibroblastes humains primaires. En marquant les mitochondries, ils ont pu confirmer que certaines d’entre elles se retrouvaient dans les fibroblastes. Le transfert mitochondrial est un phénomène répandu, se produisant également lors de la guérison des blessures, et peut se faire de plusieurs manières. Les chercheurs ont cependant pu écarter toutes les méthodes sauf une : le transfert par des nanotubes de tunneling (TNT), qui sont des ponts membranaires fins et basés sur l’actine, permettant le transport direct d’organelles et de signaux entre les cellules. Ces résultats suggèrent que les cellules cancéreuses étendent des TNT pour livrer directement leurs mitochondries aux fibroblastes. Ce transfert a également été observé avec des cellules cancéreuses du sein et du pancréas. Pourquoi les cellules cancéreuses transfèrent-elles des mitochondries précieuses à d’autres cellules ? Les chercheurs ont découvert que les fibroblastes ayant reçu des mitochondries de cellules cancéreuses présentent une augmentation de l’expression de plusieurs gènes liés aux phénotypes des CAF et à la construction de la matrice extracellulaire (MEC), ce qui stimule leur prolifération. En gros, le transfert mitochondrial des cellules cancéreuses cause une reprogrammation des fibroblastes normaux vers des CAF. Des essais ont montré une augmentation de la phosphorylation oxydative et des fuites de protons dans les fibroblastes récepteurs, indiquant que leur machinerie énergétique fonctionnait à plein régime. Le traitement avec de l’oligomycine, qui empêche la production d’énergie par les mitochondries, a bloqué à la fois l’induction des marqueurs CAF et la prolifération. Pour prouver que les mitochondries seules étaient responsables de cette transformation, les scientifiques ont isolé des mitochondries directement à partir de cellules cancéreuses et les ont transplantées dans des fibroblastes normaux, induisant les mêmes changements similaires à ceux des CAF. Il est crucial de noter que toutes les mitochondries ne sont pas égales ; celles provenant de cellules non cancéreuses avaient peu d’effet, tandis que celles de cellules cancéreuses plus malignes avaient un effet plus fort. Lorsque des mitochondries dysfonctionnelles étaient transférées, le fibroblaste ne se reprogrammait pas et ne soutenait pas la croissance tumorale chez les souris. Dans les expériences in vivo, la co-injection de cellules A431 avec des fibroblastes ayant reçu des mitochondries A431 a produit des tumeurs plus grandes et une angiogenèse accrue. Cela a soulevé la question de savoir quel facteur tumoral contrôle ce transfert. En analysant les données d’expression génique des cancers de la peau humains, l’équipe a identifié plusieurs gènes impliqués dans le transport mitochondrial, parmi lesquels un protéine, MIRO2, qui était significativement surexprimée dans les cellules cancéreuses, notamment aux bords invasifs des tumeurs où elles interagissent avec les fibroblastes. MIRO2 agit comme un moteur moléculaire, reliant les mitochondries au réseau de transport cellulaire pour contrôler leur position. Les chercheurs ont émis l’hypothèse que les cellules cancéreuses détournent MIRO2 pour déplacer leurs mitochondries en vue d’une livraison. Lorsque l’interférence par ARN a été utilisée pour réduire les niveaux de MIRO2 dans les cellules cancéreuses, les mitochondries se sont regroupées autour du noyau, réduisant la capacité des cellules à transférer des mitochondries aux fibroblastes et à les convertir en CAF. À l’inverse, augmenter les niveaux de MIRO2 dans les cellules cancéreuses a stimulé leur activité de transfert mitochondrial. En injectant des cellules cancéreuses déficientes en MIRO2 dans des souris, les cellules n’ont pas formé de tumeurs. Cependant, lorsque ces cellules déficientes en MIRO2 ont été co-injectées avec des fibroblastes chargés de mitochondries cancéreuses, cette combinaison a induit une croissance tumorale, suggérant que le rôle de MIRO2 était de provoquer la reprogrammation des fibroblastes en CAF, rôle crucial pour le développement du cancer. Les chercheurs sont optimistes quant à l’avenir de cette découverte, suggérant que le blocage de MIRO2 pourrait avoir des applications cliniques à long terme. Source : https://www.lifespan.io/news/cancer-cells-transfer-mitochondria-to-fibroblasts/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=cancer-cells-transfer-mitochondria-to-fibroblasts

Rôle des macrophages sénescents dans la progression tumorale et les opportunités de traitement

Les macrophages, cellules cruciales du système immunitaire inné, jouent un rôle fondamental dans le maintien et la régénération des tissus de l’organisme. Ils peuvent adopter différents comportements en fonction des circonstances, généralement divisés en macrophages M1, pro-inflammatoires et agressifs, et macrophages M2, anti-inflammatoires et axés sur la maintenance des tissus. Cette distinction est particulièrement pertinente dans le contexte des tissus âgés, endommagés ou cancéreux. Les cancers ont la capacité de reprogrammer les cellules immunitaires pour favoriser leur propre croissance, et les macrophages présents dans les tissus tumoraux, appelés macrophages associés aux tumeurs, sont au cœur de ce processus.

Dans un article de recherche récent, les auteurs explorent l’importance de la sénescence cellulaire des macrophages associés aux tumeurs dans l’accélération de la croissance tumorale. Bien que la sénescence cellulaire dans les tissus normaux soit souvent bénéfique pour la régénération après une blessure, les macrophages sénescents dans le microenvironnement tumoral favorisent en réalité la progression tumorale. En effet, les tumeurs évoluent pour encourager la sénescence des macrophages, ce qui soutient la réplication incontrôlée des cellules tumorales.

La communauté scientifique s’intéresse de près à l’application des sénothérapeutiques dans le traitement du cancer. De nombreux médicaments chimiothérapeutiques qui ont connu du succès par le passé se révèlent être sénothérapeutiques à la lumière des connaissances récentes. Leur capacité à détruire les cellules sénescentes ou à modifier leur comportement explique leur efficacité. Parallèlement, les chercheurs s’efforcent de manipuler les macrophages associés aux tumeurs pour rendre les tumeurs moins agressives, par exemple en incitant les macrophages M2 à adopter un état M1, afin de favoriser l’attaque des cellules cancéreuses plutôt que leur soutien.

Les macrophages jouent des rôles critiques dans le microenvironnement tumoral (TME), où leur plasticité et leur adaptabilité influencent la progression tumorale. Les macrophages M1, généralement présents dans les tissus sains, sont remplacés dans le TME par des macrophages M2, qui facilitent la progression tumorale par le remodelage de la matrice extracellulaire, l’angiogenèse et l’immunosuppression. Ainsi, les macrophages associés aux tumeurs sont centraux dans la promotion de la croissance, de l’invasion et de la métastase tumorale.

La sénescence cellulaire, initialement considérée comme un mécanisme de suppression tumorale, s’avère paradoxalement promouvoir la progression tumorale, notamment par le biais des macrophages sénescents. Ces cellules, après exposition à des stimuli spécifiques, subissent un vieillissement cellulaire, se caractérisant par l’activation de marqueurs comme p16INK4a et le développement d’un phénotype sécréteur associé à la sénescence (SASP). Les macrophages sénescents manifestent des déficiences fonctionnelles, telles qu’une inflammation chronique et une présentation d’antigènes diminuée, contribuant à un environnement immunosuppresseur propice à la croissance tumorale.

Le SASP, qui comprend des cytokines, des chimiokines et des facteurs de croissance, perturbe l’environnement immunitaire et favorise la tumorigenèse. En particulier, l’IL-6 est un facteur clé du SASP qui contribue à un milieu pro-inflammatoire et pro-tumoral. Des preuves émergentes soulignent que les macrophages sénescents aggravent la progression tumorale par la sécrétion de SASP et la dysrégulation immunitaire. Cela souligne l’importance de comprendre les mécanismes sous-jacents. Les stratégies thérapeutiques ciblant les macrophages sénescents, telles que les sénolytiques, sénomorphiques et les immunothérapies, notamment les cellules T à récepteur antigénique chimérique (CAR-T), offrent des pistes prometteuses pour stopper la croissance tumorale et inverser les effets nocifs du TME vieillissant. Les recherches futures devraient se concentrer sur l’optimisation de ces traitements et sur l’éclaircissement des interactions entre macrophages sénescents et cellules tumorales pour améliorer les résultats cliniques. Source : https://www.fightaging.org/archives/2025/08/senescent-macrophages-accelerate-tumor-growth/

La sénescence induite par thérapie : un enjeu dans le traitement du cancer

La lutte contre le cancer implique des traitements tels que la chimiothérapie et la radiothérapie, qui visent non seulement à tuer les cellules cancéreuses, mais aussi à induire la sénescence dans celles qui survivent. La sénescence cellulaire, caractérisée par l’incapacité des cellules à se reproduire, est considérée comme un résultat bénéfique, bien qu’une compréhension plus approfondie de son rôle dans le vieillissement et les maladies liées à l’âge ait conduit à une vision nuancée de la sénescence induite par thérapie dans le contexte du cancer. Les cellules sénescentes sécrètent des signaux inflammatoires pour attirer le système immunitaire, mais elles produisent aussi des signaux pro-croissance, jouant un rôle dans la régénération après une blessure. Alors qu’un petit nombre de cellules sénescentes peut stimuler le système immunitaire pour éliminer les cellules cancéreuses, une accumulation excessive peut favoriser la croissance tumorale et perturber le fonctionnement du système immunitaire. Les traitements traditionnels laissent un fardeau de cellules sénescentes chez les survivants du cancer, contribuant à un vieillissement accéléré et à un risque accru de cancers subséquents. L’utilisation de médicaments sénolytiques pour éliminer ces cellules sénescentes est prometteuse, bien que son efficacité durant le traitement du cancer soit encore à déterminer. Actuellement, la sénescence induite par thérapie (TIS) est reconnue comme une réponse commune aux traitements du cancer, mais son impact sur le pronostic à long terme est complexe et dépend de nombreux facteurs. Le microenvironnement tumoral est influencé par la TIS, avec des effets à la fois bénéfiques et nuisibles, en fonction de la nature des cytokines et des facteurs de croissance sécrétés. Une approche thérapeutique combinée, utilisant des médicaments pour induire la sénescence suivis de médicaments sénolytiques pour éliminer les cellules sénescentes, est envisagée comme une stratégie prometteuse pour améliorer les résultats cliniques. Optimiser les effets bénéfiques de la sécrétion associée à la sénescence (SASP) tout en atténuant ses effets néfastes pourrait révolutionner le traitement du cancer à l’avenir. Source : https://www.fightaging.org/archives/2025/06/the-double-edged-sword-of-therapy-induced-senescence-in-cancer-treatment/

Complexité des Interactions Cellulaires et Évasion Immunitaire dans le Cancer

Le texte traite de la complexité de la biologie cellulaire et des interactions entre les cellules et leur environnement. Il souligne que la compréhension des mécanismes cellulaires est encore incomplète et que chaque aspect de la biologie cellulaire, lorsqu’il est étudié plus en profondeur, révèle une complexité insoupçonnée. L’auteur plaide pour des approches de lutte contre le vieillissement qui se concentrent sur la réparation des dommages cellulaires connus plutôt que sur l’ajustement du comportement cellulaire. À cet égard, il est plus facile de traiter directement les dommages, comme la rouille sur des tuyaux, que de modéliser théoriquement les processus complexes qui mènent à l’échec structurel. L’exemple donné montre comment les cellules tumorales exploitent les mitochondries pour échapper à la réponse immunitaire. Les cellules cancéreuses peuvent transférer des mitochondries dysfonctionnelles aux lymphocytes T infiltrant les tumeurs (TILs), ce qui affaiblit leur capacité à attaquer les cellules tumorales. Ce transfert de mitochondries empêche normalement les TILs de procéder à la mitophagie, un processus de nettoyage des mitochondries endommagées, en raison de la présence de molécules inhibitrices. Les TILs acquérant des mutations de l’ADN mitochondrial (mtDNA) des cellules cancéreuses présentent des anomalies métaboliques et une sénescence, ce qui compromet leur fonction immunitaire. Ces découvertes suggèrent que la présence de mutations de l’ADN mitochondrial dans les tissus tumoraux est un facteur de pronostic défavorable pour les patients traités par des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire dans des cas de mélanome ou de cancer du poumon non à petites cellules. En révélant ce mécanisme d’évasion immunitaire, la recherche pourrait contribuer au développement de nouvelles immunothérapies contre le cancer. Source : https://www.fightaging.org/archives/2025/02/mitochondrial-transfer-as-a-mechanism-of-tumor-immunosuppression/